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14 septembre 2010 2 14 /09 /septembre /2010 10:00

 

 

Silence. Le silence a envahi le théâtre. Le visiteur vêtu de sombre dissimulé dans un recoin, attend la fin de la ronde du pompier. Dans la salle plongée dans le noir, les fauteuils repliés sont endormis. Rien ne viendra plus les déranger. Pas un grincement, pas un craquement du vieux parquet couvert de moquette cramoisie usée, le pompier de service s’éloigne et le bruit de ses bottes résonne dans les cintres.

Le visiteur traverse la salle en marchant comme une danseuse. Derrière le rideau la scène semble immortalisée comme sur une photographie. Des odeurs de vieux meubles, de bougie éteinte et de poudre de riz flottent dans l’air. Le décor très dépouillé a oublié les rires et les larmes des comédies et tragédies.

Au milieu de la scène un projecteur oublié éclaire d’une lumière crue le parquet ciré et dessine au milieu d’un halo les formes du seul meuble présent : une commode. Dans ce silence pesant, le visiteur surprend alors des soupirs et des murmures comme dans un dortoir de pensionnat après l’extinction des feux.

Côté jardin, le visiteur caché dans un pli du rideau, le regard fixé sur la commode la contemple en train de s’agiter et de soupirer tandis que les tiroirs s’ouvrent et se ferment martelant le tempo d’une musique militaire imaginaire. Sur la tablette un petit cake rassi, un peu bousculé, tremble sur sa soucoupe.

Côté cour, un souffle d’air frais fait voler des paillettes de poussière et dévoile quelque mouvement. La lueur timide et tremblotante d’une bougie apparaît.  Le visiteur s’enfonce un peu plus dans les replis du rideau poussiéreux.  De l’autre côté de la scène une silhouette évanescente avance. Elle glisse plutôt qu’elle ne marche. Irréelle, une jeune femme vêtue d’une longue tunique de soie blanche se dirige vers la commode. Elle pose le bougeoir près du cake. Seul, le souffle d’air devenu glacé fait penser à un mauvais rêve. La jeune femme se tourne alors vers la salle, le visage inexpressif. Elle salue des spectateurs fantômes d’une autre époque. En tendant l’oreille attentivement, le visiteur entend les applaudissements et les bravos. Comédienne, elle se redresse, le sourire de la Joconde aux lèvres et se retourne face au visiteur.

Toujours avec ce sourire énigmatique, elle dénoue le ruban de la tunique de soie qui tombe à ses pieds, dévoilant ce corps de sylphide et en caressant les courbes. Le visiteur retient son souffle. Sa main libre de tout mouvement ébauche un geste vers le corps de rêve. Il  imagine sa main se promenant sur le front lisse de l’elfe, dessinant le visage. Il pose ses lèvres sur une joue pour un tendre baiser. Sa longue main dessine la fragilité du cou et se pose sur l’arrondi d’une épaule nacrée. La pesanteur se faisant ressentir, elle se glisse vers le galbe d’un sein fièrement dressé. L’homme ne ressent plus le froid. Une vague de chaleur inonde son corps et lui fait creuser les reins. Il  voudrait s’approcher, la toucher vraiment mais ses pieds restent rivés au sol comme chaussés de plomb. 

Eve comme au premier jour se retourne vers la commode.  L’homme ébahit voit de nouveau les tiroirs de la commode s’exciter. La belle s’élève au dessus de la commode, puis s’affaisse et disparaît dans le grand tiroir. Le visiteur regarde ébahi la commode. Comme dans un tour de magie, sous les ordres de Mary Poppins, les tiroirs se mettent de nouveau en action bruyamment et ne dévoilant pas leur contenu.   Soudain le tiroir du haut est interrompu, un bras d’albâtre essaie de s’échapper.  Puis c’est au tour du grand tiroir de rester entrouvert. Un autre bras tente de s’évader et la tête de la belle sylphide émerge. On ne voit que le haut du visage animé par un coup d’œil curieux au dessus du bord du tiroir.

Le visiteur immobilisé, reste bouche bée. Secouant la tête, il fait un pas sur la scène, le cuir de ses chaussures craquant. Le projecteur s’éteint. La sonnerie de lever de rideau émet un son aigrelet. Venu d’un autre monde, une lueur blafarde n’éclaire pas la scène. C’est ce moment que choisit la voix radiophonique pour annoncer : « Vous êtes sur France Inter. Il est 7h. 

 

Mélodie M © 09-2010

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commentaires

S
<br /> <br /> ce n'était qu'un rêve ou un fantôme dans la réalité ? Bizzzzzzzz Mélodie<br /> <br /> <br /> <br />
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Toi, l'ami qui vient me lire,

Ici, tu es libre.
Tu peux juste passer le long de la clôture,
entrouvrir la petite porte,
ou bien venir t' asseoir sur le banc,
Coin-de-jardin.JPG t'imprégner des senteurs fleuries
des arbres de l'amour et de l'amitié,
des fleurs parfumées
De tendresse, de plaisir et de douceur
Reste, je te rejoindrais
à l'ombre des arbres
pour te donner la quiétude et la sérénité,
et si tu es bien, accepte quelques fleurs... 
Mon ami Sophocle,
ici tu verras comme
"il est doux de perdre la conscience de tes malheurs",
dis moi quand tu seras de passage!
Juste un signe qui sera
une graine de bonheur dans mon jardin! 

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